mercredi 28 décembre 2016

Agatha Christie : Dix petits nègres.

En 1939, l'Europe est au bord de la guerre. Dix personnes n'ayant aucun point commun entre elles se retrouvent sur l'île du Soldat sous le prétexte d'invitations ou d'offres d'emplois : le général John Macarthur, Véra Claythorne, Emily Brent, le juge Lawrence Wargrave, Philip Lombard, le docteur Edward Armstrong, Henry Blore, Anthony Marston, Thomas et Ethel Rogers. Isolés du continent par une tempête, leurs hôtes Mr et Mrs A. N. O'Nyme mystérieusement absents, les invités et domestiques se voient chacun accusés de meurtre. Ils sont alors tués l'un après l'autre, d'une façon qui rappelle les couplets d'une comptine affichée dans chaque chambre. 

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Si vous partez du principe que vous n'avez pas de temps à accorder à une nouvelle série, voilà mon argument majeur : c'est une mini-série, composée de trois épisodes d'une heure, alors me sortez pas cette excuse toute moisie pour passer à côté de ce petit bijou britannique. 

Il y a un bon paquet d'années maintenant, on m'avait imposé Les dix petits nègres en classe de cinquième, et je n'avais pas réussi à en dépasser la moitié. A présent, je suis contente d'avoir pu sortir cette histoire de mes inachevés. Adapté de la célébrissime nouvelle d'Agatha Christie, qui fait référence au titre d'une comptine anglaise pour enfants, les "petits nègres" ont pourtant été remplacés continuellement par des "petits soldats" en VF, peut-être par souci du politiquement correct. La comptine est-elle différemment traduite selon les langues ? C'est un peu bizarre, mais au delà de ça, le reste est extraordinaire. L'ambiance est plombée, très réussie, et j'ai aimé l'idée que chacun des protagonistes représente une institution : la religion, la justice, l'armée, la police, l'éducation, la médecine. Chacune étant toujours illustrée par une personne très particulière, mystérieuse ou folle à lier. Le mystère plane sur la véritable raison de leur présence, et finalement celui qui s'attire les foudres des autres est le seul à admettre, sans sourciller, ce dont on l'accuse ; son honnêteté le rendrait presque plus sympathique que les autres. Tous choqués par l'immoralité de Philippe Lombard, qui assume ses crimes sans problème, ils se décident alors à quitter l'île. Mais aucun moyen n'existant (mis à part nager dans les eaux profondes et mourir), ils se résignent tous à leur triste sort, alors que le premier meurtre se produit.

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Alors bon, on connait la chanson : un personnage est tué, une statuette disparaît, et ce jusqu'à ce que la maison soit totalement vide. L'originalité ne réside pas vraiment dans la mise en scène, mais dans le sens du détail étonnant pour un format court. Dès les premières minutes, on entre directement dans le vif du sujet, les choses s'enchaînent assez rapidement pour se focaliser sur l'aspect psychologique du récit. Certains se mettent vite à friser l'hystérie, n'arrivant plus à supporter la situation ; d'autres gardent leur calme et attendent sagement ; d'autres encore se mettent en tête de farfouiller dans les chambres et de ne laisser personne à l'écart du groupe. Il ne se passe pas grand chose en soi, mais le focus sur les réactions de chacun m'a plu, là où ça pourrait être soporifique pour d'autres. Vent, pluie, tempête et orages violents renforcent la sensation d'oppression, d'autant que les souvenirs reviennent et s'imposent peu à peu à chacun, qui se trouve alors face à sa conscience. On a ici des flashbacks vraiment magnifiques, utilisant un peu le même procédé que Dolores Claiborne (réalité sombre, passé flamboyant de mille couleurs), et moi j'adore.

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Comme je m'y attendais, le casting est aux petits oignons. On a les valeurs sûres (Charles Dance), ceux qu'on est ravis de retrouver (Burn Gorman et  Noah Taylor, aperçus également dans Game of Thrones), ou les acteurs plus méconnus qu'on découvre, mais peu importe au fond, car tout le monde livre une prestation solide. Il n'y a aucune fausse note. Chacun m'ont montré des facettes peu connues de leur registre, ce qui m'a donné envie d'en découvrir plus sur leur filmographie (Charles Dance qui sourit, j'exagère volontairement mais c'est l'idée, et le monologue de Burn Gorman qui nous émeut en parlant de son jardin qu'il ne risque pas de revoir). Tout est excellent ici : les acteurs, l'histoire, les décors, les costumes, le rythme, l'ambiance ... Modernité et esthétique d'époque se mélangent parfaitement. Peut être un bon moyen pour qui ne connaît pas l'oeuvre d'Agatha Christie (ou ne l'a pas appréciée auparavant), d'y venir. Je pense que la série peut combler aussi bien ceux qui découvrent que ceux qui connaissent déjà, tant l'ensemble nous embarque jusqu'à la toute dernière minute. Je chipote assez souvent en ce qui concerne les films ou séries de manière générale (surtout ce qui passe sur TF1, d'ailleurs), mais je dois dire que Dix petits nègres est un sans faute pour moi. Mon plus gros coup de cœur télévisuel de l'année.

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